Haroun change les règles du stand-up tout et donne à chacun l’impression qu’il pourrait en faire autant. A tort

 

Sur le net, tout le monde est critique de restaurant, de théâtre, de cinéma. Pourquoi tout le monde ne serait pas humoriste ? Haroun a 34 ans. Ses blagues ne sont pas plus mauvaises que celles de ses confrères du stand-up : une phrase : une chute. Les thèmes sont en gros les mêmes que celles de sa génération, internet, les religions etc. et ses références aussi à une différence près : il cite Blanche Gardin. Rare sont les humoristes qui se réfèrent à des confrères de l’autre sexe (ou des autres sexes faut-il dire désormais même si on attend impatiemment l’humour trans).

Ce qui différencie Haroun, c’est son non-jeu. Celui-ci est total. Sans équivalent. Il bouge peu, sa voix n’a pas un grain particulièrement agréable et il est vêtu comme un étudiant en commerce, ce qu’il fut. Même Desproges faisait des efforts. Il appelait ça des cascades. Gaspard Proust qui semble toujours pressé de quitter la scène pour aller écouter Chostakovitch en sirotant un verre de Chasse-Spleen c’est Laurence Olivier à côté. Haroun c’est le timide de la classe (et non le premier de la classe, pourquoi serait-il le premier, parce qu’il chausse des lunettes ?), le type qui donne, à tort, l’impression de prendre sur lui pour monter devant le public pour raconter ses vannes. D’où l’identification de tous les timides qui veulent leur portion de gloire et de rires. Et qui sont nombreux comme chacun sait.

Joël Raffier